Onéguine Avignon

Eugène Oneguine de P.I..Tchaïkovski

Triomphe en  Avignon

 

L'opéra de Tchaikovskï Eugène Onéguine apparait sur la scène en 1879 ,le 29 mars,au Théâtre Maly à Saint Petersbourg.

C'est la cantatrice E.A. Lavroskaïa qui lui suggère cette oeuvre,et elle sera la créatrice du rôle de Tatiana en compagnie des élève du Conservatoire pour la création.

L'argument vient du roman de Alexandre Pouchkine qui ,quartante années plus tôt avait succombé au cours d'un duel.

Tchaïkovski se replonge dans le roman sans très grande conviction...Mais le livre refermé il commence à en écrire une ébauche de partition.

Cependant un incident coupe son inspiration et la rédaction de la pièce.Pris par un désir de paraître respectable il se marie le 6 juillet avec une élève,Antonia Miloukova.

 

Cette union de quelques semaines le secoue sur le plan psychologique à un point tel qu'il se jette dans la moscova,en est repêché , mais sombre dans une passagère crise de démence.

Ayant échappé au mariage, il part pour la Suisse et l'Italie ,fait escale à Clarens ,repart et sous l'influence épistolière de sa bienfaitrice Madame Von Meck et termine la

partition.

Passée la première audition,l'oeuvre est reprise par une distribution entièrement professionnelle au Bolchoï de Moscou.La tiédeur de l'accueil des débuts se transforme

vite en véritable enthousiasme et les scènes européennes le programment.Il arrive à Milan en 1900 sous la baguette d'Arturo Toscanini.

L'histoire met face à face un Dandy propriétaire d'un domaine campagnard qui débarque dans une propriété voisine accompagnant un de ses amis,poète et

également riche propriétaire et une jeune fille Tatiana plutôt sage...Qui va soudain se révèle un être passionnée.Ambiance et personnage typiquement russes,doté de

ces intermittences de caractère inimitables,souvent incompréhensibles,que nous retrouvons dans les romans de Tolstoï et les pièces de Tchekov...Et le film Guerre et

paix de Preminger.

Tout pourrait ressembler à un de ces romans avec de l'eau de rose,des confitures et des rêves de jeune fille un peu candide.Et d'ailleurs tout commence ainsi puisque

Tatiana et Lenski s'aiment et que leur amour est chanté par les vers de Lenski ,poète à ses heures.Tout!Même Olga qui se montre le portrait de la charmante jeune

fille.Eugène s'ennuie,les petits pains et les verres de champagne ou de vodka ne le distraie pas...lest aveuglé par les souvenirs de ses con quête passées et ses

amusements urbains.Il rend tout ce monde charmant pour des “paysans‘ sans élégance et même rustaud.

Mais Tatiana est prise d'un violent sentiment pour Oneguine à la première rencontre .Et elle lui écrit...Une lettre qui pour cette époque semble indécente... Oneguine

donne une réponse en forme de visite au cours de laquelle il montre plus de mépris que de bienveillance pour ce coeur pur qui, ébloui n'a pas cru avoir joué avec le

feu de la passion,mais néanmoins s'est brûlé.

Au cours de la réception donnée pour la fête de Tatiana,Oneguine qui s'ennuie toujours autant, pense se distraire en l'invitant à danser avec une effronterie et un

aplomb cynique.

Lenski proteste,maladroitement, il blesse Tatiana par des mots exprimant le doute...Alors qu'elle ne pense pas à mal...Simplement peut être à le faire enrager...Il

persiste,alors Tatiana renchérit sur les invitations successives de Oneguine.Et le drame éclate...Et Lenski contre toute attente ne saisit pas la plaisanterie et se jette

dans le duel contre Oneguine. Le perd et meurt. Oneguine fuit la tourmente de ses sentiments et de ses remords .Pour lui il a tué son ami... durant deux années il

voyage.Vainement , puis revient à Moscou.

Il se trouve face à la Princesse Germine. Femme d'une subtile et éblouissante élégance et

découvre qu'elle n'est autre que Tatiana.Oneguine est ébloui,subjugué et ne pense plus qu'aà reprendre ce qu'il a méprisé autrefois.Gremine survient et lui explique à

quel point il aime Tatiana,à quel point elle est pour lui le bonheur de chacun de ses jours.

Oneguine n'en a que faire et suit son entêtement.Il aima Tatiana et la veut!Ni plus ni moins.

Mais Tatiana même en aimant passionnément Oneguine ne changera pas de voie.Elle ne peut trahir l'amour de son mari qui lui a tant apporté pour un homme qui l'a

méprisée jadis.

Oneguine ne se suicide pas.Il continuera à s'ennuyer comme un mondain et cela est peut être une pire punition.

Tous les exégètes s'accordent pour voir en Lenski le poète et Tatiana sa tiède fiancée deux composantes de la personnalité ambiguë de Tchaïkovski.

Loin de moi de me lancer dans une étude psychologique de bazar.,Tchaïkovski à un degré supérieur possède les deux éléments comme chacun de nous,féminin et

masculin ,le premier très poussé ,le second assez peu affirmé.Le fait qu'il n'ait jamais réussi à surmonter ses passions instinctives et qu'il en ait atrocement souffert a

déterminé toute son oeuvre.Un créateur puise en lui même et Oneguine comme Tatiana ou Lenski son une part de Piotr Illytch

Musicien de très haut vol,il nous a laissé d'inoubliables partition et pièces comme La Dame de Pique et Eugène Oneguine reflet des êtres tels qu'ils purent exister en

1850.

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L'opéra d'Avignon reprenait les décors de Jean Pierre Capeyron et la mise en scène de Claire Servais qui s'illustra à Metz en Première.

Une mise en scène sobre et dynamique à laquelle je reprocherais un acte final confus et une direction d'acteur un peu floue.Cependant il faut considérer la

dimension plutôt stricte de l'opéra d'Avignon ,elle ne permet tout de même pas de folles ivresses de plateau.

L'essentiel et le remarquable de cette soirée vint de la direction d'orchestre du chef israélien Rani Calderon et des chanteurs,tous à leur plus haut niveau.

L'orchestre d'Avignon semble avoir été heureux -tant les cordes discipliné et rendu moelleuses et vives que les pupitres de l 'harmonie et des cuivres,de jouer avec ce musicien né dont les tempi et les attaques respectent les chanteurs de façon élégante et libre à la fois.

Les plans sonores et la délicatesse de certains soli s 'accompagnent d'élans dont le nerf , l'énergie,la tension et la densité des moments tragiques composent les variantes d'atmosphère.Ce travail est d'un artiste qui respire avec son instrument...Son instrument est l'orchestre...Et Rani Calderon ressemble ,alors qu'il se tient sobrement au pupitre ,au pianiste soliste dont il occupe le tabouret en récital à ses heures.

Attentif,capable de rectifier les difficultés s'il en survient ,lyrisme mesuré avec subtilité...Parfaitement cohérent,équilibrant la scène et la fosse,dirigeant comme inspiré par ceux qui oeuvrent avec lui. Il ne plastronne pas,il baigne dans sa musique,rien n'existe en dehors des heures qu'il consacre à l'oeuvre présente .

Il nous avait déjà comblé avec Aïda de Verdi l'année passée,le pari de la musique russe et celle de Tchaïkovski en particulier me semble plus proche encore de la fidélité.

Il parvient à rendre toute sa noblesse à cette musique assez folle, passionnelle et sentimentale...Que certains mélomane disent “débordante“ Ici , jamais elle ne dégouline.

L'air de Lenski , un sommet de sincérité , de pudeur ,portant un désespoir poignant à l'écoute de nos sens.  Florian Laconi s' exprime admirablement, avec cet art de dire  son angoisse et  ses regrets de bonheur perdu à jamais, en sanglots tus .Si hurlant de ce silence bouleversé de sons, l'accompagnement exprime alors ce que les mots ne laissent pas toujours passer,ces harmoniques impalpables qui font que le coeur se met à battre aux oreilles de celui qui entend et saisit soudain combien le moment est unique.

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Tatiana par bonheur voyait arriver à la dernière minute Natalia Kovalova,extrêmement belle et talentueuse.De beaux aigus,une ligne de chant naturelle,un legato

parfait,belle ampleur et largeur de voix.Un très beau soprano lyrique qui chante avec aisance et élégance.

Très belle allure aussi de Armando Noguera dont la voix de baryton chaleureuse et souple accomplit à merveille les rebondissement d'expression et de caractère de

Eugène .Fat ,précieux et effronté ,peu aimable dans le premier acte il donne au troisième acte la dimension poignante de son personnage.Une très belle composition.

Nous attendions Nicolas Courjal en Gremine avec espoir.Il nous a comblé.La voix est  présente,chaleureuse, d'une ampleur et d'un port remarquable.Il a conservé ses notes graves

lumineuse et musicale de sa prime jeunesse et cette vaillance émerveillée qui font que l''expression et l'art de la déclamation lyrique sont dignes des plus grands.

Le reste de la distribution, Isabelle Vernet en Nourrice,Marie Lenormand en Olga et Doris Lamprecht fut excellent.Ces rôles sont importants sur le plan lyrique,peu

exposés mais il y faut du métier et une art de la comédie et du chant très élaborés.

Une très belle représentation,digne des meilleurs opéras d'Europe.

Et cet opéra n'est pas des plus faciles,surtout pour nous français.

Amalthée

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Hélène Cadouin
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