Tristan et Isolde au placard !

Une mise en scène blafarde aveugle le talent des acteurs chanteurs.

 Nous l’attendions dans cette affaire !

Où plutôt nous savions quelle soupe elle nous servirait !

Madame Katarina Wagner arrière petite fille du compositeur par Wolfgang son père, se pique de mise en scène depuis vingt ans. Ce n’est plus une gamine loin de là mais son travail quel qu’il soit demeure toujours inabouti s’effilochant sans véritablement signifier une idée ou une opinion défendable.

 

Après Les Maîtres Chanteurs orduriers de 2010 qui voyaient le chevalier poète Stolzing devenu peintre en bâtiment pisser de la peinture partout par délire “intello“, alors que  des chiots en alignement sur la scène à la place de cathèdres professorales nous guérissaient à jamais de revoir cette œuvre en ces lieux,  nous voici dans la “boite à chaussure“ de Tristan et Isolde. Moins désordre. Pas moins bobo-intello .

Pièce hautement symbolique de Wagner présentée ici uniformément sombre, ennuyeux au possible  et dénué de toute poésie.  La prétention  est de traiter du machisme et de la question féministe aux siècles précédents.  Un bla bla inabouti comme toujours avec madame Wagner qui en fin de parcours multiplie les images mais ne parvient pas à la synthèse de son discours. Les décors (Franck Philipp Slössmann) pisseux et incongrus. Premier acte un ensemble de piliers dans la cale cargo. Mais on ne met pas de voyageur dans une cale même aujourd’hui et les grimpettes aux échelles  le long des flancs du navire par Kurvenal (Ian Paterson) dérange la vision du spectateur à des instants dramatiques  que la fosse d’orchestre sublime.

Le rapport à la mer, au ciel,  à leur immensité, qui  dépasse celui du Hollandais et du Vaisseau dans l’œuvre de Wagner  est absent. Or les éléments et la Nature tissent la pensée du compositeur.  Et la partition trame le poème, tend  l’action au fond de la nuit et du mystère de fusion du désir charnel, de la mort et de l’amour. Le tout fondu en un noyau d’un futur Big Bang sensuel, sentimental mystérieux qui anéanti ceux qui ont échangé le regard essentiel et le filtre substantiel d’un amour incandescent.

Rien de la philosophie ni de la poésie wagnérienne dans cette panacée de Katarina.

Rien  d’amoureux  ou de viscéral de sauvage ou de délétère raffiné. Ici le vide ! Et les quelques gestes des acteurs portent à faux quand ce n’est pas  à contre courant nuisent à la compréhension.

Depuis  Molière et son Misanthrope il existe des disciplines dans lesquelles il est possible  sans connaître un métier de se glisser et de persister.

La situation de madame Wagner après quelques études dans une école libre de théâtre, est  hyper privilégiée et permise par  un système laxiste qui  dénie le mérite et l’expérience et lui permet d’opérer sur les œuvres de son arrière grand père sans coup férir.

Désormais sans concurrence sur la place elle régente les programmes et engage qui elle veut. À  ces conditions là il vaudra mieux dans le futur se rendre à Vienne et New York pour entendre et surtout voir les œuvres de Wagner plutôt qu’à Bayreuth.

La preuve en est puisqu’il en est besoin, cette année les gens n’ont  pas trouvé  preneur à des places à 190€. Que ce soit pour Tristan, Lohengrin, ou le Ring. Le niveau des mises en scène à Bayreuth est désormais si mauvais que même un chef comme Thielemann ne parvient plus à faire que l’on veuille à tout prix voir et entendre ce Tristan…Ou même autre chose.

Poursuivons avec la distribution.

Au cours des répétitions Anja Kampe, excellente soprano lyrique qui devait interpréter le rôle d’Isolde déclare forfait. Officiellement elle ne s’entend pas avec le chef ?!

Evelyn Herlitzius si magnifique à Vienne dans Brünnhilde en Mai(2015) campe alors cette Isolde de bleu sombre vêtue dont elle n’a plus et loin le poids, le charme, la dimension physique , l’élan irrésistible et têtu et pas plus la moiteur, la plénitude et l’envol délirant  de la voix. Elle a crié comme  perdue et sans repaire de nuances du début à la  fin de la  séance et je n’ai retrouvé d’elle en son interprétation ni la géniale et flamboyante Electra (2013) d’Aix en Provence, ni la Brünnhilde extasiée de Bayreuth (2005) et Vienne (2015).

Face à cette Isolde asséchée le Tristan de Stephen Gould est plus que méritoire. Je vous ai commenté  son Siegfried à Vienne il y a peu sous  la direction de S.Rattle. Le voici dans le rôle le plus épineux et le plus long du répertoire lyrique comme de l’ambitus de ténor dramatique et lyrique. Et je reconnais  que sans excès de manières et dans toute la franchise et l’ampleur de ses capacités vocales il a sauvé la représentation par une incarnation nuancée et forte. Par bonheur la carrure de cet artiste au caractère entier lui a sans doute évité les fantaisies du metteur en scène !

Un Tristan portant  les traits de chevalier héroïque serviteur et ami de son roi, sobre et puissant,  allant droit à l’amour comme droit à la mort.

La voix d’un airain profond possède les aigus amples et sonores du rôle. Placé dans une mise en scène plus fidèle aux désirs de Wagner il aurait sans doute plus d’abandon et de frémissement intérieur. Mais sa diction et son sens du texte s’accordent à une musicalité vocale désormais traitée de manière instrumentale et la maturité venue il ressemble et incarne de manière authentique ce Tristan flottant entre l’amitié délicate  pour ses proches, son amour filial pour son roi et ce désespérant sentiment de reconnaissance et de passion brûlante, dévorante de la femme qui l’ayant tiré de la mort le veut à nouveau embarquer pour l’au delà avec  elle.

Georg Zeppenfeld ne fera oublier personne en roi Marke. Il faut lui donner l’excuse d’être ridiculisé par  l‘accoutrement  que lui fait porter cette production .Un habit jaune foncé et des attitudes brutales et dominatrices  envers Isolde qui sont le contraire de ce qu’écrit Richard Wagner. Là encore on n’est jamais aussi bien trahi que par les siens.

Au point que, fantaisie incongrue de la mise en scène Isolde ayant chanté le Liebestot[1] en lieu et place de s’écrouler sans vie sur le cadavre de Tristan , est récupéré par le bras du roi Marke qui la tire en arrière et l’embarque sans façon à sa suite.

Comme dirait Toto : t’as le bonjour de la légende !

La mort d’amour est trop simple pour Madame Katarina…ou bien elle ne lit pas les sources…et peut être même n’a-t-elle pas lu Tristan et Isolde jusqu’à la fin !

Quelle honte ! Ce sont des gamineries de maternelle qui dénote un manque de maturité et une prétention incroyable. Pour quels motifs obscurs imaginer que Isolde en petite bourgeoise viendrait voir mourir son héros avec son mari cocu ?

C’est le contraire que dit le roi Marke dans son admirable période finale. Il précise que Brangaene lui a fait comprendre le drame, la tragédie et cet irrésistible amour etc. Il n’a accompagné Isolde auprès de Tristan blésé à mort par Melot que pour accorder son pardon… Une fois encore un metteur en scène veut capter une œuvre qui ne lui appartient pas pour la transformer en  torchon.

Quant au décor du troisième acte avec ses pyramides multipliées et translucides qui montent et descendent il sert à obscurcir encore la compréhension du drame.

Mais non d’une pipe ! Mesdames et messiers les metteurs en scène débrouillez vous d’accoucher d’une œuvre si vous en êtes capables ! Au lieu de farcir, trahir, déboussoler, enlaidir et détourner de son sens  et vous ridiculiser avec les pièces des autres !

Le chef Christian Thielemann qui dirige ici un orchestre aux sonorités superbes et aux solistes d’une qualité inoubliable a mis un “mouchoir dans sa poche“ pour garder sa place ! Sa direction fortement influencée par le charabia ambiant manque de nuances et d’abandon. Lui aussi semble amoindri dans son talent et moins libre de porter cette partition au zénith.

C’est à pleurer de voir un spectacle pareil à Bayreuth.

Le reste de la distribution est homogène. Excellente Brangaene de Christa Mayer brillante et farouche elle possède l’élan et la pureté vocale des grands sopranos dramatique. Par instant elle domine l’Isolde d’Herlitzius de manière fracassante. Elle a tout : l’ampleur, la force, le timbre égal à tous les registres, les aigus d’une déconcertante aisance et la capacité d’élocution des voix possédant une réserve d’énergie expressive quasi infinie. Sa tenue en scène est d’un caractère entier et dominateur .

Le Kurvenal de Iain Paterson  mérite d’être entendu et vu dans d’autres circonstances. Un beau timbre de basse baryton et des capacités vocales inouïes.

On se disputait à Bayreuth pour avoir des places ! Aujourd’hui on ne revend plus les excédents devenus de plus en plus nombreux !

Avec les gens qui ne reviendront pas cela fera de la  place pour d’autres beaucoup moins connaisseurs.

De cette manière Madame Wagner pour se livrer au pillage systématique dst œuvres de son arrière grand père. Pour les snobinards et les Bobos et gogos ça passera.

Amalthée

 

 

La suite à venir



[1] Chant d’amour et de mort au dernier acte le dernier chant

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Hélène Cadouin
dite "AMALTHÉE"

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